1. C'est un artiste qui vivait à la campagne aux environs de Paris à la fin du 19ème. Il peignait par petites touches des tableaux sublimes représentant des paysages tantôt enneigés, tantôt baignés par la lumière crue de l'été. Il savait nous faire sentir la beauté calme d'une soirée au bord de la Seine. C'est un peintre impressionniste. As-tu deviné son nom ? Claude Monet ?
2. Perdu ! Il s'appelle Alfred Sisley et c'est le grand oublié du mouvement impressionniste qui a tant bouleversé l'histoire de la peinture. Certes, les grands musées, comme le Musée d'Orsay à Paris, possèdent aujourd'hui de belles collections de ses œuvres mais si son nom figure bien dans les livres d'art, pour le grand public, le mouvement impressionniste est d'abord lié à celui de Claude Monet. Pourquoi le nom de Sisley n'est-il pas aussi célèbre que ceux de Monet, Pissaro, Cézanne ou Van Gogh ?
3. On peut avancer plusieurs hypothèses . La première est liée à ses origines. Né à Paris en 1839 de parents anglais, Alfred Sisley, malgré plusieurs tentatives, n'obtint jamais de son vivant la nationalité française. Trop anglais pour les Français et trop français pour les Anglais. La seconde explication, sans doute la plus importante, tient à son caractère. Sisley était un homme simple et timide qui n'aimait pas se mettre en avant. Contrairement à Pissaro qui avait un tempérament de leader ou à Cézanne qui avait une haute estime de lui-même, Sisley préférait rester dans son coin et peindre tranquillement ses paysages.
4. Peut-être même que s'il n'avait pas été repéré en 1872 par le grand marchand d'art Paul Durand-Ruel, qui lui acheta sa première toile, Sisley serait-il resté à jamais dans l'ombre de ses amis impressionnistes. Mais l'œil de Durand-Ruel était trop sûr. Il fut en effet le premier à comprendre l'importance de ces nouveaux artistes qui peignaient comme on ne l'avait jamais fait auparavant.
5. En effet, jusqu'au milieu du 19ème, la peinture n'avait que peu évolué depuis la Renaissance. Les artistes peignaient en atelier des sujets dits académiques c'est-à-dire essentiellement inspirés de la Bible, de la mythologie gréco-romaine ou des portraits. Pour être reconnus, les peintres devaient présenter des toiles qui entraient dans ces critères . Avec l'arrivée de nouveaux outils tels que la peinture en tube, le chevalet portatif et les pinceaux plats, les peintres commencent à sortir de leur atelier et posent leurs toiles au bord de la mer, le long d'une rivière, près d'un étang ou dans un champ.
6. C'est une révolution ! D'autant que les sujets représentés ne correspondent pas du tout à ce qui était traditionnellement attendu dans la peinture classique. Fini les tableaux de rois, de reines ou de batailles ! Oubliées les grandes scènes racontant les héros bibliques ! Ce qui intéresse les peintres impressionnistes c'est avant tout le jeu de la lumière et des ombres sur l'eau, la neige, la brume, les feuilles, les arbres et les fleurs.
7. Grâce à ses pinceaux plats, Sisley dépose de petites touches de couleur sur ses toiles. Lorsqu'on les regarde de près, on ne voit rien d'autre qu'une juxtaposition de traits colorés. Mais si on s'éloigne un peu, le miracle s'accomplit et apparaît un merveilleux paysage, vibrant de lumières et d'ombres subtilement colorées. Sisley réussit magnifiquement à restituer la nature qu'il observe.
8. Hélas, si Sisley était habile à capturer les lumières de ses paysages, il le fut moins pour attirer celles de la notoriété et ce n'est qu'à la toute fin de sa vie (il meurt en 1899) qu'il fut enfin reconnu.